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Pleins feux sur … les questions prioritaires pour la recherche en sciences de la mer

« Comment pouvons-nous appeler cette planète Terre alors qu’elle est manifestement Océan? » – Arthur C. Clarke

Les océans recouvrent soixante-dix pour cent de notre planète, mais ils demeurent largement inexplorés et peu compris. Il n’est pas facile d’observer et de colliger des données sur une région aussi vaste et qui peut devenir excessivement inhospitalière par moments. Considérant l’immensité du territoire à explorer et le nombre de questions qui se posent, il peut se révéler un défi pour les chercheurs et les organismes de financement de la recherche de déterminer où investir leurs ressources et leur temps précieux.

Le récent rapport d’atelier du CAC, Les 40 questions prioritaires pour la recherche canadienne en sciences de la mer, constituait un exercice d’établissement de priorités visant à cibler les questions de recherche qui, si elles trouvaient réponse, permettraient le mieux d’aborder les possibilités et les défis reliés aux sciences de la mer qui se présenteront au Canada. Le CAC a mis en œuvre un processus ouvert, collaboratif et démocratique pour faire en sorte que les résultats soient représentatifs des instances scientifiques canadiennes, mais également qu’elles soient pertinentes pour les utilisateurs des sciences de la mer, tels que les responsables et les décideurs politiques. Cette approche innovatrice a permis d’obtenir l’avis collectif de nombreux experts dans le but de concentrer et de diriger la collecte de données à un stade antérieur à l’évaluation proprement dite, qui est actuellement en cours. Ce fut une expérience d’apprentissage intéressante et stimulante pour le CAC que de recueillir le point de vue d’experts avant de procéder à l’évaluation complète.

Le processus a débuté par un sondage pancanadien en ligne mené auprès des océanographes, à qui on a demandé de soumettre des questions candidates. Ce sondage a abouti à une liste de départ de 600 questions, qui a été traitée afin de regrouper les questions qui se recoupaient ou qui étaient connexes. Chaque question devait de plus répondre à un ensemble de critères d’adéquation et de pertinence décrits dans le sondage. Un premier vote s’est fait pour trier de façon préliminaire les questions, mais la liste définitive a été définie au cours d’une séance d’une journée et demie de discussions intenses menée dans le cadre d’un atelier auquel participait un groupe cadre de 22 experts provenant de partout au Canada.

Le groupe cadre représentait un éventail de disciplines liées aux sciences de la mer, parmi lesquelles l’océanographie physique et biologique, la biogéochimie, la gestion et la gouvernance et même la sécurité nationale. Ces experts ont discuté de chaque question, partagé les connaissances accumulées et évalué la priorité relative de chacune des questions de recherche candidates.

Cette collaboration entre représentants des universités et du secteur privé, chercheurs gouvernementaux et décideurs politiques a permis d’orienter plusieurs de ces discussions selon une optique plus globale que ce qu’il aurait été possible de faire sans un groupe d’experts aussi divers que dévoués. Plusieurs participants à l’atelier ont mentionné combien ils avaient appris au cours du processus, ayant partagé une somme considérable d’expertise collective entre eux.

Une fois la liste de 40 questions convenue, il est devenu manifeste que la plupart d’entre elles avaient une portée multidisciplinaire. Elles ont donc été regroupées sous des thèmes basés sur de grands axes de recherche : améliorer la compréhension scientifique fondamentale; la surveillance des données et la gestion de l’information; la compréhension des incidences des activités humaines; et éclairer les processus de gestion et de gouvernance.

De tels exercices d’établissement de priorités ont été menés pour définir les priorités de recherche dans des domaines comme la biologie de conservation au Canada et aux États-Unis, les politiques en appui à la conservation au Royaume-Uni et l’agriculture mondiale. Mais contrairement aux exercices similaires qui l’ont précédé, celui-ci servira à évaluer les besoins et les capacités du Canada au regard des questions prioritaires définies dans le cadre de ce processus de collaboration.

Finalement, bien que le Canada soit bordé par trois océans, tous les participants à l’atelier ont convenu que l’étude des sciences de la mer au Canada ne pouvait se confiner exclusivement à notre territoire. Les sciences de la mer ont acquis une portée de plus en plus internationale et multidisciplinaire, et des projets à grande échelle, des réseaux et des programmes de recherche ambitieux ont été mis en œuvre pour répondre aux questions complexes que soulèvent les océans du globe. Cet état de fait se reflète dans les questions prioritaires de recherche et orientera les types de capacités et les collaborations stratégiques qui permettront au Canada de maintenir sa tradition d’excellence dans le domaine des sciences de la mer.

Jonathan Whiteley est chercheur au Conseil des académies canadiennes. Il a récemment obtenu son doctorat en sciences de la biodiversité à l’Université McGill.